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Carnets de Birmanie: conclusion
 

La Birmanie est un pays très différent des autres pays d'Asie du Sud-Est. De par ses paysages d'abord. Des ors de la pagode Schwedagon de Rangoon au gigantisme de Bagan en passant par les reflets parfaits du lac Inle, leur beauté est touchante.

Le pays vaut également d'être visité pour son mode de vie encore très intact. Certes les marques occidentales ont déjà inondé le marché birman, et devraient devenir encore plus envahissantes avec l'ouverture croissante à la concurrence. Certes dans certaines zones un tourisme déjà bien développé a perturbé les équilibres traditionnels. Mais la société birmane est loin d'avoir perdu toutes ses particularités et excentricités, et son spectacle est toujours aussi dépaysant.

Un bouddhisme strict règle encore les âmes. Les femmes tous les matins s'enduisent le visage de thanaka. La majorité des hommes portent le sarong et le bétel qu'ils mâchouillent à longueur de journée leur donnent tous les dents rouges. Les moyens agricoles de ce pays dont le secteur primaire représente encore 40% du PIB sont archaïques, et la population dans les zones rurales se déplace encore massivement dans des charrettes tirées par des bœufs ou des chevaux. On a parfois l'impression que le temps s'est arrêté en Birmanie.

Depuis le changement de président et la constitution d'un gouvernement semi-civil en avril 2011, le processus d'ouverture politique du pays s'est doucement mis en marche. Des signes ne trompent pas. Les ouvrages d'Aung San Suu Kyi sont aujourd'hui en vente libre. Les portraits de la « Dame de Rangoon » peuvent désormais être affichés fièrement sur les murs des maisons. La présence policière et militaire est discrète. Les gens dans la rue parlent librement et n'hésitent pas à critiquer le régime.

Cependant la Birmanie fait toujours face à de nombreux défis humanitaires et sociaux. La cohésion nationale d'un pays qui ne possède pas moins de 135 groupes ethniques reconnus pose toujours problème. Les guerres ethniques, dont notamment le plus vieux conflit armé du monde qui oppose au sud du pays l'État central et les séparatistes karen depuis 1948, font l'objet de la plus grande omerta.

Beaucoup d'enfants, et de très jeunes enfants, sont utilisés pour le service dans les restaurants, le ménage dans les hôtels, ou encore les travaux des champs.

Les télécommunications sont chères et peu fiables, les connexions Internet rares et lentes. L'électricité demeure majoritairement produite par des groupes électrogènes qui ne fonctionnent que par intermittence, les coupures de courant sont quotidiennes. Il n'existe pas de système centralisé de traitement des déchets, sûrement difficile à mettre en place dans le cinquième pays le plus corrompu du monde. Dans ces conditions les maladies se propagent vite, d'autant que l'hygiène est très mauvaise. Le bétel représente également un véritable problème de santé publique, tant nous avons croisé de dentitions pourries et de regards hagards.

Enfin, paradoxalement, le plus grand danger qui guette la Birmanie du XXIe siècle pourrait peut-être venir d'un flot d'argent excessif alimenté par les investisseurs étrangers ou le tourisme de masse. La cohésion sociale et l'identité du pays sont directement menacées. Les conséquences pourraient être désastreuses, à l'image de ce qui se passe chez le voisin thaïlandais, qui semble déjà avoir vendu son âme au diable...

 

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