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Carnets de Birmanie: 1/5


07/02

7h45, atterrissage à l'aéroport international de Rangoon, début de l'aventure birmane! Un pays étrange, indépendant de l'Empire britannique depuis 1948 et officiellement devenu Myanmar en 1989, mais que tous les étrangers continuent d'appeler Birmanie. Une capitale désormais située à Nay Pyi Taw, à laquelle tout le monde préfère Yangon (Rangoon en français et en anglais).

Des véhicules qui roulent à droite avec un volant à droite, suite à une subite décision gouvernementale aux obscures explications astrologiques. Une nation qui se régénère depuis un an et demi et l'arrivée au pouvoir d'un gouvernement semi-civil beaucoup plus libre que la junte précédente, qui en presque cinquante ans de dictature a fait du pays l'un des plus pauvres et des plus corrompus du monde.

Dès l'arrivée en centre ville, notre taxi est stoppé par d'importants bouchons. Le chauffeur nous explique qu'ils sont quotidiens, matin et soir principalement, depuis que le gouvernement a diminué incroyablement le prix des véhicules l'an dernier. Un mini-bus en mauvais état comme le sien coûtait 20 000 US$ fin 2011, maintenant il en vaudrait plutôt 6 000.

Ces mesures sans précédent ont permis à des milliers de nouveaux foyers d'acheter une voiture. Les effets se ressentent en terme de congestion du trafic, et une nouvelle autoroute est actuellement en construction pour rallier l'aéroport au centre-ville.

Notre conducteur, qui parle un très bon anglais, nous explique également que le Myanmar a connu un afflux de touristes considérable ces dernières années, notamment des français et des allemands, mais aussi quelques asiatiques. Le nombre de visiteurs par an est en effet en constante augmentation, représentant près de 260 000 voyageurs entre janvier et octobre 2012.

Notre interlocuteur semble aborder ces sujets avec une relative dé-complexion. Mais lorsque je lui pose des questions un peu plus contentieuses, il préfère les ignorer pour ne pas que notre discussion prenne une tournure trop politique qui pourrait le mettre en danger.

Rangoon offre d'emblée son lot de surprises. Les marques occidentales, pour la plupart interdites d'entrée sur le marché birman depuis vingt ans, s'affichent désormais ostensiblement. Lionel Messi et ses publicités pour Pepsi concurrencent les affiches vantant les mérites des produits Mastercard.

Sur les trottoirs des rues très colorées, de nombreuses femmes ont le visage étrangement couvert d'une sorte de crème épaisse marron qui s'apparente presque à du sable. Elle provient d'un arbre qui s'appelle le thanaka et vise à protéger la peau du soleil, nous explique-t-on. Sur la chaussée, une circulation folle grouille dans tous les sens, mais aucun deux-roues motorisé, que le gouvernement a formellement interdit.

Objectif de ce premier jour: entrer en possession de la monnaie locale, le fameux kyat. Un véritable parcours du combattant, puisqu'il est impossible d'utiliser une carte de crédit internationale pour retirer directement dans un distributeur birman ou ailleurs. Le seul moyen est donc de changer sur place des dollars américains. Il faut non seulement que ceux-ci aient été édités après 2006, mais également qu'ils soient en parfait état, vierges de toute inscription ou même pliure.

C'est donc après plus d'une heure à arpenter les rues de l'(ex) capitale en déclinant pléthore d'offres toutes plus douteuses les unes que les autres, que nous ressortons d'un bureau de change semi-officiel avec plusieurs grosses liasses de billets sous le bras. Un euro équivaut environ à 1 000 kyats, et nous n'avons obtenu que des coupures de 1 000 et 5 000 kyats!

C'est donc un peu dubitatifs mais soulagés que nous visitons la pagode de Schwedagon. Le majestueux édifice, dont la cloche centrale culmine à quelques 98 mètres au-dessus du sol, est l'un des emblèmes de Rangoon. Elle est absolument sublime, et contrairement à beaucoup de sites touristiques en Asie, l'authenticité du lieu semble préservée et les nombreux marchands de souvenirs bien moins agressifs.

Accessible par d'imposants escaliers, cernée d'habitations et d'une multitude de petits temples et autres stûpas, les décors sont très richement ornés et particulièrement bien entretenus pour une pagode plus que millénaire.

Une controverse demeure sur son âge exact, puisque la légende dit qu'elle a été bâtie il y a 2500 ans, tandis que pour les historiens la construction se situerait davantage entre le VIe et le Xe siècle. L'édifice a toutefois dû être reconstruit de nombreuses fois au cours de son histoire, suite à plusieurs tremblements de terre.

Pour le moment c'est encore un peu difficile de réaliser et de prendre la mesure du pays, une nuit blanche passée dans les avions n'aidant sûrement pas. Mais cette première visite laisse augurer une belle suite de voyage.




08/02

Après avoir bien récupéré, la deuxième journée peut commencer tôt. Du moins suffisamment pour assister au silencieux défilé des bonzes, drapés dans leur toge safran et le crâne rasé, qui demandent aux habitants de Rangoon l'aumône de leurs repas quotidiens. La scène semble assez incongrue dans un pays où la population peine bien souvent à se nourrir elle-même.

Il n'est même pas 8h et le marché est déjà très animé. L'hygiène des étals est parfois douteuse, surtout en ce qui concerne la viande. Elle est transportée directement dans des pickups et découpée à même le comptoir, entreposée dans la chaleur, à côté des têtes dépecées des chèvres et des moutons.

Les birmans, du moins dans les quartiers sud de Rangoon que nous avons visités ce matin-là, ressemblent soit à des Indiens, soit à des Thaïlandais. Nous n'avons pas encore trouvé de morphotype birman particulier.

Les hommes portent pour la plupart l'habit traditionnel, le sarong. Ils mâchent une étrange substance rougeâtre enroulée dans des feuilles de bétel, donnant à leur bouche cette inquiétante couleur sang. Ils crachent abondamment et le bitume des trottoirs en est tout recouvert.

Un autre élément frappant dans l'(ex) capitale birmane: sa relative ouverture. Les gens circulent librement, la présence policière ou militaire est quasiment invisible. Des messages sont diffusés un peu partout pour demander à la population d'être accueillante avec les touristes, et en effet elle l'est.

Mais surtout, illustration assez représentative du changement qui s'opère aujourd'hui dans le pays car inimaginable il y a encore deux ans: des portraits d'Aung San Suu Kyi couvrent les murs, et ses ouvrages trônent sur tous les présentoirs des libraires de rue.

Nous nous dirigeons en milieu d'après-midi vers la principale gare routière de la ville, pour y prendre le bus qui nous conduit au lac Inle. La station est immense et bondée, dès notre arrivée plusieurs personnes nous accostent pour nous proposer des tickets, de façon presque agressive. Une sortie de Rangoon un peu comme une préparation à l'accueil qui nous attend au lac Inle.



Voici trois vidéos et quelques photos légendées pour essayer de mieux se rendre compte de l'atmosphère de Rangoon:

Un marché:
http://youtu.be/-VOkI11R-BQ

Un carrefour:
http://youtu.be/bUZGQFgLQG4

Une procession festive:
http://youtu.be/c6vnSQdars0




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